Le Shaho

L’esprit du Kyudo, par Earl Hartman

Le Shaho (la Loi du Tir)
est un loi naturelle immuable, pas une invention humaine.
En conséquence, le tir doit être en accord avec les principes naturels.

On peut traduire « Shaho » de bien des façons. « Sha » signifie « le tir », et le caractère « Ho » est généralement rendu par « loi », dans le sens de principe essentiel ou fondamental. J’ai donc choisi de rendre le terme « Shaho » par « Loi du Tir ». Dans mon esprit, cela signifie une loi naturelle qui, découlant de la nature inhérente de l’arc et de sa relation avec l’archer, définit les principes de base de la méthode du tir.

Au niveau matériel, l’arc est un outil comme un autre, et a donc été élaboré d’une manière particulière pour un objectif spécifique. Il y a donc une méthode parfaite pour l’utiliser. Il est évident que cette méthode, pour être parfaite, a besoin d’être en harmonie avec la nature intime de l’arc et ses principes fondamentaux de fonctionnement. C’est pourquoi la méthode parfaite, la Voie Parfaite est déterminée par la nature de l’arc et n’est pas une création artificielle. Ce que je veux dire est que, même si l’arc et la technique de l’utiliser sont des créations humaines, la loi qui préside au fonctionnement de l’arc n’est pas une invention arbitraire, mais découle de la nature même de l’arc.

La Voie parfaite pour utiliser l’arc est formulée dans le Shaho. Elle est exprimée dans le Shaho Hassetsu (les 8 phases de la Loi du Tir) qui constituent les fondements de l’art du tir. Le shaho a été découvert et élucidé par les anciens maîtres, et il représente la quintessence de leur connaissance empirique. Le shaho exige donc la pratique la plus intense et la plus assidue.

Le kyudo est l’union parfaite de l’archer et de l’arc et ne peut exister sans cette union. Afin de tirer à l’arc conformément aux exigences du shaho, votre corps doit aussi se conformer aux principes qui lui sont inhérents. C’est le principe du « shizentaï », le corps naturel. Beaucoup de gens interprètent « naturel » dans le sens de sans règles ni contraintes. Mais la philosophie du kyudo postule que la nature a ses propres règles et principes directeurs, que le kyudo est fondé sur ces règles et principes, et que l’homme doit s’entraîner assidûment afin de les découvrir puis de les mettre en pratique.

Pour saisir l’essence d’un art, le pratiquant doit être capable de comprendre intuitivement le principe essentiel et unifiant qui sous-tend et anime tous les aspects de cet art. Dans le kyudo, c’est par l’unification du corps, de l’esprit et de l’arc qu’on peut découvrir ce principe. Cela demande un mental clair qui peut voir les choses comme elles sont réellement. En tant qu’être humain, vous êtes constitué d’un esprit, d’un mental, et d’un corps. Comme votre corps est dirigé par votre esprit et votre mental, il ne fonctionnera correctement que quand votre esprit et votre mental seront clairs et purifiés. Votre corps devient alors « seïkitaï », un corps vivant, qui peut agir suivant les principes du shizentaï et donc exécuter les shaho hassetsu correctement. Quand votre mental est clair et votre esprit tranquille, alors vous comprendrez la nature de l’arc et ne chercherez pas à lui imposer (opposer) votre volonté. Il faut ouvrir les yeux de l’esprit à la nature de l’arc, et ayant compris cette nature, ne pas lui résister, mais tirer en harmonie avec elle.

Je pense que c’est une partie de ce que Urakami Hanshi veut exprimer quand il dit « L’essentiel ne consiste qu’en l’élimination des doutes et de l’ego, et en l’éveil à l’ainséité de la Nature ». Quand vous avez éliminé vos préjugés et intellectualisations et appris à vous fier à votre intuition, vous vous éveillerez au principe directeur naturel qui est à l’oeuvre dans le tir. Alors vos corps, esprit, mental, vont naturellement s’entre-équilibrer, et « la flèche sera imbue de puissance et animée de vie propre, les éléments distincts vont s’unir, et le décocher va se produire de lui-même ».

C’est la manifestation vraie du kyudo.

Suite: Pratique constante